Les animaux comme source de sucre

Les animaux comme source de sucre

Les apiculteurs dérangent régulièrement les ruches, écrasant ainsi certaines abeilles dans le processus. Les apiculteurs remplaceront le miel des abeilles par du sirop de maïs riche en fructose ou du sucre raffiné bon marché et pourraient même tuer les colonies afin d’éviter d’avoir à maintenir les ruches tout au long de l’hiver. De nombreux apiculteurs couperont les ailes de la reine ou utilisent une cage « d’exclusion » pour empêcher la reine de déplacer la ruche; beaucoup tueront aussi la reine lorsque la production d’œufs diminuera. Ils peuvent utiliser de la fumée pour forcer les abeilles à sortir de la ruche afin que le miel puisse être récolté. Certains apiculteurs incendient toute la colonie à l’arrivée de l’hiver.

Dans un environnement naturel, la reine des abeilles, et non l’apiculteur, choisirait l’emplacement de la ruche et le nombre d’œufs produits. Les abeilles récolteraient du nectar et du pollen pour nourrir leurs propres communautés. Les abeilles se soucient-elles d’avoir perdu le contrôle de leur vie? Probablement. Non seulement les abeilles ont un cerveau, mais ils utilisent celui-ci pour former des concepts abstraits et arriver à des consensus. Joan Dunayer a décrit comment « les éclaireuses (qui sont toutes des sœurs) recherchent une cavité dans un emplacement convenable, en termes de taille et de siccité, » lorsqu’elles planifient leurs colonies. « Une abeille éclaireuse peut annoncer un site propice pendant plusieurs jours », ajoute Dunayer, mais « si la découverte d’une sœur s’avère plus attrayante que la sienne, l’abeille cesse de promouvoir son choix initial et commence à danser en faveur de cet autre site. Elle est capable de changer d’avis et de ‘vote’ ».

Les abeilles ont un système nerveux central complexe, plusieurs ont un sens aiguisé de la vue et de l’odorat, et elles emploient des méthodes complexes de communication et d’architecture des nids. De toute évidence, elles vivent leur vie, évitent la souffrance et recherchent ce qui les attire et les nourrit. »
– Lee Hall

TROIS RAISONS DE NE PAS MANGER DE MIEL

« Unique parmi toutes les créatures de Dieu, seule l’abeille à miel améliore l’environnement et ne nuit à aucune autre espèce. » ~ Royden Brown

De la plante de basilic, un fort bourdonnement retentit, des ailes vibrent dans l’air, cherchant sans fin le nectar. Quand on regarde vraiment ces créatures étonnantes butiner et polliniser ces minuscules fleurs blanches, on se demande comment une si petite créature peut faire une si grande différence dans nos vies.
Pourtant, sans l’humble abeille :
– la nourriture sur votre table;
– les fleurs dans votre jardin;
– les vêtements sur vos épaules;
pourraient tout simplement disparaître.

Les abeilles* pollinisent près de 80 % de toutes les cultures de fruits, de légumes et de semences aux États-Unis. Nous pouvons pulvériser des engrais et des pesticides nocifs sur les plantes pour nous « débarrasser » de certains problèmes (et en créer de nouveaux), mais nous n’avons pas encore créé un produit chimique capable de polliniser avec succès les grandes cultures. Néanmoins, nous avons créé un système agricole qui risque de tuer l’une de ses plus grandes contributrices en recherchant des méthodes efficaces de pollinisation et de production du miel.

*Bien qu’il existe de nombreuses espèces d’abeilles qui pollinisent les fleurs et les cultures, ce travail est réalisé de manière disproportionnée par les abeilles d’élevage.

On nous a fait croire que le miel est simplement un sous-produit de la pollinisation essentielle effectuée par les abeilles d’élevage. Saviez-vous cependant que les abeilles sauvages (comme les bourdons, les abeilles charpentières et les abeilles fouisseuses) sont de bien meilleures pollinisatrices? Elles sont également moins susceptibles que les abeilles domestiques d’élevage d’être affectées par les acariens et les abeilles africanisées. Le problème, c’est que ces abeilles indigènes peuvent hiberner jusqu’à 11 mois par année et ne vivent pas dans de grandes colonies. Elles ne produisent donc pas une quantité massive de miel. Entrez dans une industrie de 157 millions de dollars par année et trois raisons pour lesquelles vous devriez cesser de manger du miel aujourd’hui.

1. DONNER UN RÉPIT AUX ABEILLES

Tandis que vous étendez une cuillère à soupe de miel sur vos rôties le matin sans y réfléchir, sachez que la production de chaque goutte de miel n’a pas été chose simple. Pour produire une livre de miel, une colonie doit visiter plus de deux-millions de fleurs, en volant plus de 88 000 km, à des vitesses allant jusqu’à 25 km/h. Au cours de sa vie, une abeille ne produira environ qu’une cuillerée à thé de miel, qui est essentielle à la ruche pour les périodes où le nectar est rare, comme en hiver. Parfois, il peut y avoir un excédent dans la ruche, mais cette quantité est difficile à déterminer et les apiculteurs à grande échelle retirent souvent la majeure partie ou la totalité du miel qu’ils remplacent par un succédané de sucre ou du sirop de maïs. Pouvez-vous imaginer que quelqu’un remplace tout le jus de fruit dans votre maison par du soda aromatisé aux fruits? Cela peut quand même vous donner de l’énergie, mais éventuellement, vous rendra probablement malade.

Une autre chose à laquelle il faut réfléchir tandis que vous êtes assis près de votre bougie en cire d’abeille et que vous contemplez la vie de ces petits êtres est que les abeilles doivent consommer environ huit livres de miel pour produire chaque livre de cire! Plus nous prenons le fruit de leur travail (pollen d’abeille, gelée royale, propolis), plus ces créatures doivent travailler dur et plus il faut d’abeilles, ce qui n’est pas une bonne nouvelle pour une population en déclin.

Quand on voit un pot de miel, on peut penser aux ruches illustrées dans des histoires d’enfance comme Winnie l’ourson. Mais la plupart des ruches sont maintenant réduites à de grandes boîtes (une forme complètement étrangère aux abeilles) qui sont chahutées et expédiées partout au pays pour polliniser les cultures et produire du miel. Cela est stressant et déroutant pour le système naturel de navigation des abeilles. En cours de route, les abeilles sont perdues et tuées et peuvent transmettre des maladies d’une ruche infectée à une autre. La pratique de l’apiculture limite souvent le régime alimentaire des abeilles aux monocultures (*pensons au miel de bleuet, de trèfle ou de lavande), introduit de grandes quantités de pesticides dans leur système et fait en sorte que les abeilles d’élevage évincent les pollinisateurs sauvages indigènes qui auraient pu être présents autrement dans cet environnement. Les apiculteurs (même les petits apiculteurs) tueront également les reines s’ils estiment que les abeilles risquent d’essaimer (de fuir leur maison en forme de meuble-classeur) ou les faux-bourdons* qu’ils jugent inutiles pour la production de miel.

* La principale fonction du faux-bourdon est de féconder la reine au besoin.

Le miel est un véritable aliment santé, mais un aliment santé pour les abeilles. Plus nous interférons avec leurs processus naturels, tant en comptant sur les abeilles d’élevage comme pollinisatrices (plutôt que sur d’autres abeilles, insectes ou animaux sauvages indigènes) que pour nourrir nos désirs de « sucreries », plus nous approchons la catastrophe agricole.

2. LE CAS DE LA DISPARITION DES ABEILLES

La question de savoir ce qui arrivera si les abeilles disparaissent n’est peut-être pas loin d’être résolue. Au cours des dernières années, plusieurs reportages sur la disparition d’abeilles et le syndrome d’effondrement des colonies (CCD) ont été publiés dans le New York Times, le Star Tribune, le Huffington Post, PBS, Discovery News et bien d’autres. Si rien d’autre ne nous ouvre les yeux, peut-être que la disparition des abeilles à la une des journaux le fera. Les scientifiques s’empressent de découvrir ce qui cause ce problème avant qu’il ne soit trop tard et que nous ne perdions l’important maillon environnemental créé par les abeilles.

Jusqu’à présent, il existe trois principales théories / facteurs contributifs :

Les pesticides

L’Université d’État de Pennsylvanie a publié une étude en 2010 qui révèle des « concentrations sans précédent » de pesticides dans les abeilles et les ruches aux États-Unis. (S’il en est ainsi, on peut s’interroger sur ce qui se trouve dans votre miel.) Certains de ces produits chimiques tuent des abeilles, et, devinez quoi, L’Agence américaine de protection de l’environnement (EPA) est au courant.

« L’EPA identifie deux néonicotinoïdes spécifiques, l’imidaclopride et la clothianidine, comme étant très toxiques pour les abeilles. Les deux produits chimiques causent des symptômes chez les abeilles, comme la perte de mémoire, la perturbation de la navigation, la paralysie et la mort. Les deux produits chimiques ont été associés à beaucoup de décès d’abeilles domestiques et à l’interdiction subséquente de leur utilisation en France et en Allemagne. Plusieurs pays européens les ont déjà interdits. L’an dernier, la Slovénie et l’Italie ont également banni leur utilisation qu’elles considèrent comme un risque important pour les populations d’abeilles domestiques. »
– Mother Earth News

Ce sont d’anciennes nouvelles : cette histoire est parue en 2009. Mais est-ce que quelque chose a changé depuis? Il semblerait que non.

Acariens et virus
Puisque leur système immunitaire est affaibli (stress, sources alimentaires inférieures, pesticides, etc.), les abeilles sont plus sensibles aux virus, aux infections fongiques et aux acariens. Bon nombre de ces infestations se propagent lorsque les ruches sont transportées à travers le pays ou transférées d’un pays à l’autre.

Bien qu’il existe un certain nombre de traitements sur le marché contre les acariens, les virus, les champignons et autres nuisances qui attaquent nos colonies, aucun n’a complètement résolu le problème. Ces traitements peuvent également introduire des antibiotiques, des pesticides et d’autres produits chimiques dans les ruches dans le but de prévenir ou de guérir des infections. Si ces produits chimiques (souvent sous la forme de bandes) ne sont pas retirés de la ruche dès qu’ils perdent en efficacité, ils peuvent contribuer à rendre les virus ou les acariens résistants aux traitements futurs.

Téléphones cellulaires
Il s’agit de l’une des plus récentes théories sur le syndrome d’effondrement des colonies (CCD) qui doit encore être étudiée.

« Selon un chercheur suisse qui a récemment publié un article sur le sujet, les ondes électromagnétiques des téléphones portables ont un impact significatif sur le comportement des abeilles domestiques et pourraient nuire à celles-ci dans le monde entier. »
« Pour tester la relation entre les abeilles domestiques et les téléphones cellulaires en fonction, il a placé des téléphones à l’intérieur des ruches et a ensuite documenté la réaction des abeilles. Il a constaté qu’en présence de téléphones cellulaires en fonction (qui ne sont pas en mode veille), les abeilles produisaient les signaux sonores qui indiquent habituellement qu’il y a une perturbation dans la colonie.
– ABC News

Mis à part les téléphones cellulaires, les pesticides et les virus, l’apiculture commerciale, qu’elle soit biologique (où les décès d’abeilles sont moins nombreux, mais se produisent toujours) ou conventionnelle, ne donne pas aux abeilles la possibilité de vivre leur cycle de vie normal. Quelle que soit la taille de l’animal, l’agriculture reste une activité lucrative. Que vous choisissiez d’acheter du miel d’un petit producteur local ou d’une grande marque, consommer du miel ou d’autres produits dérivés du travail des abeilles encourage l’utilisation des abeilles à des fins lucratives.

Vous avez encore envie de miel? Eh bien, ce qui suit pourrait vous faire changer d’idée.

3. L’HISTOIRE DE LA PRODUCTION DU MIEL

Il existe d’autres substances produites par les insectes (comme la gomme-laque) et des produits dérivés de parties d’insectes (le pigment carmin issu de la cochenille) qui peuvent être utilisés dans les aliments, mais qui ne sont pas considérés comme des aliments en soi. Certains insectes sont aussi consommés comme aliments, mais le miel demeure le seul produit « créé par » des insectes à être commercialisé comme aliment.

Voici la véritable histoire de la production de cet « édulcorant santé » :
• Les abeilles cherchent une source de nectar.
• Lorsqu’elles trouvent une fleur qui leur convient, elles creusent et en recueillent le nectar dans leur « jabot » (un estomac pour le miel).
Pas si mal jusqu’à maintenant, mais attendez.
• Les abeilles mâchent ensuite le nectar régurgité en le mélangeant à de la salive pour y ajouter des enzymes.
• Puis elles l’avalent de nouveau.
• Puis elles le régurgitent de nouveau.
• Ce processus est ensuite répété… de nombreuses fois.

Si nous pouvions voir ce processus en action, voudrions-nous vraiment en étendre sur notre pain grillé? Bien que certaines personnes puissent hausser les épaules et dire « et alors? », le fait est que le miel est véritablement un mélange de nourriture régurgitée et de crachats.

Permettez-moi de vous poser la question suivante :
Y a-t-il d’autres aliments que vous mangeriez volontairement et qui ont été avalés, régurgités, mélangés avec de la salive, ravalés, mâchés, puis régurgités de nouveau? Peu m’importe à quel point c’est sucré ou « bénéfique pour la santé », l’un de mes principes de vie est le suivant : ne mange rien qui sort de l’estomac d’un autre animal.

La vie des abeilles est complexe : elles ressentent la douleur, elles dansent pour communiquer et elles voient le monde avec des yeux en Technicolor. Même si elles ne nous offrent pas directement leur aide, nous devrions être reconnaissants de tout ce qu’elles font de leur plein gré et ne pas leur en demander plus.

J’espère que la prochaine fois que vous verrez des abeilles, vous les observerez de plus près et ferez preuve de gratitude envers leur travail en plantant un jardin riche en fleurs et en laissant le miel, la cire et les autres produits issus des abeilles à ces créatures ailées qui en ont vraiment besoin.

Même la plus petite des créatures mérite le droit de vivre sa vie sans faire partie d’une chaîne de production.

Par Alisa Rutherford-Fortunati, Gentle World